Le pape François vient de nous quitter. Les hommages affluent du monde entier. La Vie y consacre bien sûr son dernier numéro, mais tous les journaux, radios et chaines de télévision y accordent une place considérable. Cela montre que, même dans un monde déchristianisé, cette figure en blanc reste un repère important pour de nombreuses personnes. C’est aussi le moment de se demander ce qu’il représente pour nous, Les Amis de La Vie, et à quoi son héritage nous appelle.

Parmi Les Amis de La Vie, les attitudes à l’égard de l’Eglise varient. Certains sont très investis dans leur paroisse, d’autres ont pris leurs distances avec la messe, pour d’autres encore, la lecture de l’hebdomadaire La Vie reste le seul lien avec le message chrétien. Le pape François a réussi à parler à toutes ces personnes. Il avait un langage simple, il était capable de parler de la foi avec des mots de tous les jours, il n’avait pas besoin du jargon théologique. Il avait aussi des formules choc : la mondialisation de l’indifférence, l’Eglise hôpital de campagne, etc. Chacun comprenait ce qu’il voulait dire. Et puis, ses paroles étaient toujours assorties d’actes : son premier déplacement à Lampedusa, les réfugiés syriens qu’il a ramenés en avion de Lesbos, les installations sanitaires et le coiffeur pour les sans-abris aux abords de Saint Pierre. L’Evangile, annoncé en actes et en mots simples parle à tous. C’est une leçon à méditer.

Les Amis de La Vie s’inscrivent dans la ligne du christianisme social, un courant que certains disent en perte de vitesse mais que le pape François a pleinement incarné. Il en a à la fois reformulé l’exigence pour chacun de nous, tout en rappelant l’humilité qu’il convient d’avoir dans les relations avec les autres. Laudato Si’ illustre à merveille ce double mouvement. Ce texte restera emblématique de la volonté de François de ne pas séparer la justice sociale des questions écologiques, nous invitant à « écouter tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres » (LS 49). « Il faut donc une préoccupation pour l’environnement unie à un amour sincère envers les êtres humains, et à un engagement constant pour les problèmes de société » (LS 91). Tout en mettant la barre très haut pour les chrétiens, le pape François affirme que « l’Église n’a pas de raison de proposer une parole définitive et elle comprend qu’elle doit écouter puis promouvoir le débat honnête entre scientifiques, en respectant la diversité d’opinions » (LS 61). Cette volonté de vivre sa foi chrétienne par un engagement dans la société et un souci du débat démocratique rejoint parfaitement Les Amis de La Vie. C’est un style de vie chrétienne à cultiver et à transmettre aux générations futures.

Enfin, Les Amis de La Vie sont une association de laïcs. Le pape François est celui qui a fait confiance aux laïcs. Il les a appelés à s’engager tous « dans la transformation ecclésiale et sociale dont nous avons tant besoin » dans sa Lettre au Peuple de Dieu d’août 2018. La synodalité est sa façon d’impliquer les laïcs dans la vie de l’Eglise et l’annonce de l’Evangile. Le mot reste peu connu dans la société mais il désigne en fait des procédés qui s’y vivent déjà. Avec ce « marcher ensemble », le pape invite l’Eglise à quitter son fonctionnement monarchique et à adopter un mode de travail collaboratif, faisant appel à l’intelligence collective, aux savoirs expérientiels. Avec quand même une spécificité car dans l’Eglise synodale, il ne s’agit pas seulement d’écouter les autres pour en apprendre, mais aussi d’écouter ensemble l’Esprit Saint. Pour le pape François, « il est impossible d’imaginer une conversion de l’agir ecclésial sans la participation active de toutes les composantes du Peuple de Dieu ». Est-ce que nous avons pris conscience de la responsabilité qu’il fait désormais reposer aussi sur nos épaules ? Que nous sommes devenus le premier visage de l’Eglise pour bon nombre de nos contemporains ? C’est un changement profond qui mettra du temps à infuser dans l’Eglise et dans la société.

Voilà les premiers points qui me viennent spontanément à l’esprit en pensant au pontificat du pape François et qui ne peuvent que conforter les Amis de La Vie à continuer leur chemin en fidélité à son héritage.

 

Monique Baujard

Présidente des Amis de La Vie

24 avril 2025